Revue Etudes Tsiganes

Fnasat-Gens du voyage
Fédération nationale des associations solidaires
d'action avec les Tsiganes et les Gens du voyage
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APPEL A CONTRIBUTION N° 76


Nouvelles économies

Alain Reyniers proposa, à l’occasion de deux numéros qu’il a dirigés en 1998 et 2018, de définir l’économie tsigane comme une économie de niche, d’intermédiation. Cette position, dans la continuité de la réflexion des années 1980 sur les groupes péripatétiques (Rao, 1985), montre que si le nomadisme constitue la face visible à travers laquelle sont distinguées les populations tsiganes, celui-ci n’est bien souvent qu’une manière détournée de caractériser un mode économique reposant sur des manières de faire circuler des marchandises et de proposer des services. Cette approche constituait une rupture avec les approches folkloriques divisant les activités tsiganes entre les activités « traditionnelles » et celles qui seraient empruntées aux sociétés environnantes. Aujourd’hui les concepts de niche ou d’enclave (Le Marchand 2011) à travers lequel les Tsiganes sont appréhendés comme étant en capacité de se positionner pour proposer des prestations intermédiaires (Loiseau, Perrin et Pulliat 2022), qui s’inscrivent donc plutôt en marge ou dans les interstices de l’économie formelle (Brazzabeni, Cunha et Fotta, 2016) sont devenus dominants dans les descriptions et analyses des économies tsiganes. Dans ces approches, les compétences négociatrices des individus sont valorisées en ce qu’elles leur permettent dans un même geste de s’affirmer en tant que tsigane et de s’insérer économiquement.
Ce numéro, mélange offert à Alain Reyniers, propose de faire le point sur les économies tsiganes dans une perspective critique et comparative. Nous souhaitons, en premier lieu, que ce numéro aborde l’histoire des concepts et des controverses qui ont depuis les années 1980 structurées l’analyse des économies tsiganes et de leur diffusion dans le champ des sciences économiques. Ce retour épistémologique nous apparaît comme un préalable important pour saisir les perceptions et réceptions de ces économies, ainsi que la manière dont les Tsiganes eux-mêmes se positionnent entre eux et tentent de faire bouger les modalités de leur inscription dans une économie globalisée. La place des tsiganes dans l’économie interroge les lieux de cette inscription que ces lieux soient ceux de production, d’échange et de consommation internes aux collectifs ou en liens avec la société majoritaire ou d’autres groupes minoritaires.
Tout d’abord, il sera intéressant d’analyser la construction du rapport à la valeur travail et la manière dont les individus structurent leur implication dans la sphère économique, à partir de cadres ou de formats évolutifs. Il sera intéressant d’observer des trajectoires de bifurcation (Grosseti 2008), soit de rupture avec un mode de vie itinérant dit « traditionnel » où le travail intérimaire et le salariat peuvent trouver une place qu’il conviendra de caractériser (Guérin 2021). Il sera aussi intéressant de mettre en perspective les discours et stratégies de dissidence vis-à-vis de la définition imposée du travail et des attentes sociales d’insertion économique. Les logiques de justification autour de la valeur travail feront ainsi l’objet d’une mise au point et d’éclairages permettant de mieux saisir les logiques individuelles et collectives.
Ensuite, nous nous intéresserons aux rôles des populations tsiganes dans les dynamiques de l’économie circulaire. Alors que les études classiques sur l’économie tsigane ont toujours mis en exergue cette capacité des populations tsiganes à faire circuler les biens produits par les sociétés sédentaires, à être des « recycleurs de génie » (Olivera 2015) ils demeurent néanmoins largement ignorés des expertises et des dispositifs institutionnels mis en œuvre dans ce domaine. Par ailleurs, cet axe proposera de faire le point sur la façon dont les populations tsiganes ont pu et continuent d’être utilisées par l’économie globalisée, comme « armée de réserve du capitalisme » dirait Marx, du fait même des conditions précaires dans lesquelles elles sont maintenues.
En second lieu, nous souhaitons en outre de l’analyse de l’économie, par les activités, voir ce que les terrains tsiganes peuvent apporter à d’autres champs de l’économie. Tout d’abord en contrepoint des approches interstitielles, nous nous attarderons sur les lacunes et failles institutionnelles qui induisent une absence de prise en compte des populations tsiganes de manière structurelle. La polyvalence des activités combinée à l’itinérance et parfois aux difficultés d’accès aux formations sont autant d’éléments qui conduisent au fait qu’ils échappent toujours aux dispositifs d’aide dans le secteur économique. L’épisode du Covid en a été un révélateur particulièrement important (cf. Le Marchand 2020).
La question du capital et de sa transmission reste un grand impensé des économies tsiganes, alors même qu’il s’agit d’un enjeu majeur : quelles sont les formes d’accumulation de capitaux économiques, d’héritage, de division, de mise en commun ? Dans le cas français, cette question est souvent écartée au profit de mise en avant de manifestations « sensationnelles » de refus de transmission intergénérationnelle et reste un champ inexploré. Dans le cas roumain, la question historique de l’esclavage et de l’absence de capital contemporain pose la question de l’exploitation comme structure héritée sans être pour autant présentée dans ces termes. Enfin, plus largement la question de l’accès à l’argent et de ses usages a été brièvement évoquée dans la littérature (Stewart 1994, Cousin et al. 2023), mais reste une question peu explorée. Dans l’économie contemporaine, l’accès au crédit est le moyen principal de financement des activités économiques, aussi l’inscription dans le système de crédit bancaire, son exclusion et son contournement sont des objets majeurs pour comprendre le positionnement des acteurs. Les articles sur la constitution du capital et l’économie monétaire des Tsiganes sont particulièrement les bienvenus.

+ d'info



 

Qui sont les Roms, les Manouches, les Sinti, les Gitans, les Voyageurs ? Pourquoi les désigne-t-on comme Tsiganes ou Gens du Voyage ? Sont-ils tous nomades ? Que signifie la sédentarisation pour eux ? En dehors de la France, dans quelles régions du monde
les rencontre-t-on ? Quelles y sont leurs conditions d'existence en termes de travail, d'habitat, de santé, d'éducation des enfants ?
Sont-ils des citoyens à part entière des pays où ils vivent ? Quel avenir peuvent-ils espérer
?

Depuis 1955, la revue "Etudes Tsiganes" répond à ces diverses questions en faisant appel aux meilleurs spécialistes issus de la recherche ou du travail social. Si, dans un premier temps, elle adopte plutôt la forme d'un modeste bulletin d'association paraissant trois à quatre fois par an, elle s'étoffe très vite, notamment en faisant une place de plus en plus grande à la photographie. A partir de1993, elle devient semestrielle et s'organise autour de numéros thématiques : Europe, identité, musique, femmes, mémoire, communication, école, nomadisme… Aujourd'hui, la revue propose une structure plus élaborée avec, autour d'un dossier central, des témoignages, un courrier des lecteurs, des rubriques permanentes apportant des informations diverses sur l'actualité des Tsiganes en Europe et dans le monde, leur musique, les publications scientifiques et la documentation audio-visuelle.

Reconnue, notamment sur le plan international, comme seule revue de référence en langue française dans son domaine de prédilection, "Etudes Tsiganes" se développe plus que jamais comme instrument indispensable d'information rigoureuse et de réflexion à destination des chercheurs, des acteurs sociaux et du public plus vaste des citoyens curieux et engagés.



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Sous la direction de Grégoire Cousin et Gaëlla Loiseau le Conseil scientifique de la revue Études Tsiganes reçoit des articles en vue de publication. Les articles sont publiés après évaluation anonyme par deux réviseurs. Les articles proposés peuvent répondre à un appel à contribution thématique ou être proposés hors thématique (varia). La revue publie dans les champs disciplinaires des sciences humaines et sociales et encourage particulièrement les contributions des jeunes chercheurs.

Vous pouvez envoyer vos propositions d'articles à : contributions@etudestsiganes.asso.fr

Plus d'information sur la procédure de soumission et d’évaluation

Consignes aux auteurs

 

 

 

 

n° 74 - La fête

De la fête foraine au mariage gitan, la fête fait partie intégrante des modalités d’expression et de perception des populations tsiganes. Attractive, sensationnelle ou dérangeante, elle ne laisse pas indifférents les observateurs extérieurs au point de devenir dans certains cas le prétexte à une mise en scène des identités tsiganes. La vivacité des approches esthétiques et artistiques inspirées de l’imaginaire de la fête tsigane se décline aussi bien à travers des représentations essentialistes, genrées et racisées, tout comme elle peut se muer en instrument subversif de ces identités à travers des figures androgynes ou travesties.
Dans un contexte où les arts forains sont en passe d’être reconnus comme patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, Études Tsiganes a souhaité interroger la place et le rôle de la fête non seulement au sein de la vie des familles et communautés tsiganes et voyageuses, mais aussi dans la manière dont elle structure des milieux professionnels, des identités et des cultures festives.
Ce numéro rassemble ainsi des contributions d’historiens, de géographes et d’anthropologues fournissant une lecture de la fête comme moyen d’expression de soi et du collectif, allant des jeux d’interprétation musicaux à l’espace du musée.

 

 

n° 72-73 - Ukraine

L’offensive russe sur l’Ukraine est au cœur de l’actualité mondiale depuis le 24 février 2022. Le surgissement de la guerre, comme souvent, ravive ou met en péril les possibilités d’affirmation des minorités culturelles. Or, l’Ukraine fait partie des pays européens où l'implantation des Roms est historiquement et culturellement importante. L'offensive russe a rendu terrible la vie de nombreuses personnes en Ukraine et les Roms ne font pas exception. Certains d'entre eux combattent dans l'armée ukrainienne, d'autres vivent sous occupation russe dans l'est et le sud de l'Ukraine, d'autres ont dû fuir l'Ukraine. Cependant, en tant que réfugiés, les Roms ukrainiens sont souvent mal accueillis en Europe et souffrent de discrimination à bien des égards. Aussi, nous avons souhaité mettre en lumière différents aspects de la participation des Roms à la culture nationale ukrainienne, en proposant dans ce numéro thématique des traductions portant sur des sujets variés en anthropologie, histoire, histoire de l’art, littérature et linguistique permettant de saisir la diversité et la richesse de la contribution culturelle des Roms d’Ukraine.

 


 
 
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